Reportage

Durga Mela à Calcutta. Jours d’effervescence et de spiritualité.

Quand Durga arrive de l’Himalaya pour recevoir l’hommage qui lui est dû toute la ville est en émoi. Chaque quartier prépare son accueil pendant des mois en érigeant des temples éphémères où la déesse va résider avant de s’éclipser jusqu’à l’année prochaine.

Texte Catherine Gary. Photos Fabrice Dimier



Dans le quartier Kumartuli les artisans préparent les effigies @ Fabrice Dimier
Au quartier des artisans on façonne des divinités par milliers
 


 

Une fois terminées, les effigies de Durga sont acheminées vers les Pandals. @ Fabrice Dimier
C’est à Kumartuli qu’il faut aller les semaines qui précédent pour comprendre l’importance de cette tradition sacrée dont la portée devenue internationale est en cours d’inscription au Patrimoine mondial par l’Unesco. Dans ce quartier de potiers, les artisans et les artistes sont à l’œuvre jour et nuit car les commandes affluent de tous côtés. Autant de quartiers de cette mégapole de 14 millions d’habitants autant d’associations qui préparent leur sanctuaire. 



On travaille l’argile avec l’eau et la paille de la rivière Hoogly, affluent du Gange sacré, pour former d’abord grossièrement les grandes silhouettes qui seront ensuite affinées puis peintes.

Seuls les artistes chevronnés auront l’honneur de donner vie aux effigies en dessinant leurs yeux. L’activité bat son plein au fond des ateliers à peine éclairés où chacun a sa spécialité. On voit passer des chars et des déesses portées à bout de bras une fois terminées.

Mais les grands échafaudages qui préfigurent les temples achevés se montent directement dans les quartiers car ils sont gigantesques et nécessitent la participation d’équipes entières de bénévoles et d’artisans confirmés.

Durga est au centre d'une salle circulaire dont les miroirs reproduisent à l'infini des oiseaux qui fuient les ondes et radiations.@ Fabrice Dimier

De gauche à droite : Création originale présentant Durga victorieuse du buffle démoniaque en compagnie de sa monture le lion et de ses quatre enfants et Trophée Emotion. Durga interstellaire. @ Fabrice Dimier
Durga, la déesse aux mille et un pouvoirs
 
La tradition rapporte que le démon Mahishasura terrorisait les dieux et menaçait de les évincer. Fatigués de ses attaques, ceux-ci s’adressent alors à la fameuse trilogie de l’olympe hindou, Brahma, Shiva et Vishnou, pour faire cesser ces vilenies.

Après mure réflexion il est décidé qu’une déesse munie de dix bras armés affrontera la bête avec lance, arc et flèche, hache, massue, conque et trident. Et en effet, celle-ci terrasse le monstre à tête de buffle ce qui lui vaut depuis lors une gloire bien méritée. On l’honore pour ses pouvoirs et ses qualités. Tantôt protectrice et mère nourricière, elle peut être donneuse de mort comme dispensatrice d’amour, colérique mais aussi joyeuse...
Elle est accueillie dans l(‘enthousiasme chaque année vers la fin du mois d’octobre lorsqu’elle quitte ses hauts sommets de l’Himalaya pour venir visiter Ganesh, Lakshmi, Saraswati et Kartikeya, ses quatre enfants, en chevauchant le lion sa monture  sacrée.

Les temples éphémères rivalisent d’art et de créativité
 
Ces temples ou pandals, il y en aurait plus de 1000 à travers la ville, gagnent en ampleur chaque année.

Certains nécessitent des budgets hors-normes pouvant dépasser les 50 000 euros si leur projet réussit à convaincre les investisseurs publics ou les sponsors privés.Pour cela, les artistes concourent avec dossiers bien étayés et soutenus par le thème qu’ils veulent illustrer. Car Durga se prête de plus en plus aux revendications multiples de la société et du monde contemporain. Il y a de quoi lui faire porter des messages. Harmonie entre l’homme et la nature, lutte contre la pollution, tolérance morale et religieuse, sauvegarde de la planète, refus du travail des enfants, dénonciations diverses…On la représente ici protégeant des enfants maltraités, là se préservant des émanations toxiques avec un masque à gaz ou encore entourée de créatures transgenre… Mais d’autres pandals restent aussi fidèles à la simple tradition d’une Durga victorieuse du monstre, entourée des siens, ce qui n’empêche pas la créativité car aucune effigie ne se ressemble.

Ce pandal a pour thème les riques liés à la polution d'où le masque porté par Durga.. @ Fabrice Dimier

Tôt le matin du dernier jours les offrandes de fleurs et de fruits aux divinités au bord de la rivière Hoogly . @ Fabrice Dimier
Les foules déambulent au cœur des pandals
 

La fête dure six jours, ou plutôt six nuits et pour en profiter il faudra vivre à l’envers. Car c’est quand le soir tombe et jusqu’à l’aube que tout s’anime ici.

On se fait vite d’ailleurs à ce nouveau rythme dans l’effervescence tonique qui règne le long des barrières de bambous canalisant les foules à l’approche des sanctuaires. On les voit de loin, illuminés par des milliers de lampes et de projecteurs. Mais impossible de les visiter tous, on se contentera des plus imposants si on  a la chance d’être guidé dans en véhicule privé par une personne expérimentée qui saura gagner du temps et proposer une belle sélection dans ce labyrinthe urbain. Pas facile il est vrai car ils sont tous époustouflants.


Au bord de la rivière, les adieux poignants à Durga 


​Tôt le matin du sixième jour les femmes sont à l’honneur car Durga est aussi mère de la fécondité.


Elles vont de ce pas honorer la déesse dans leur beau sari rouge pour se souhaiter bonheur conjugal et belle descendance tout en s’appliquant une poudre vermillon qui anime leurs visages de rires et de gaité. Pendant ce temps, au bord du fleuve, le marché regorge de fleurs pour les pujas, ces offrandes faites aux dieux avec encens, nourriture, parfums et bougies. Après les ablutions dans l’eau sacrée.

Dans l’après-midi vient le moment crucial des adieux à Durga. La multitude des effigies longuement façonnées et célébrées sont menées sur des kilomètres de procession jusqu’à la rivière Hoogly pour y être immergées. La déesse adulée retourne à sa source, terminant ici sont cycle de vie jusqu’à l’année prochaine.

Calcutta lui fait ses adieux dans les pleurs en espérant la revoir l’année prochaine… Longtemps abandonnées au fil de l’eau, on se contente désormais d’immerger ces effigies avant de les détruire sur la terre ferme pour éviter la pollution des eaux. Les temps changent aussi dans cette Inde millénaire.

 

Fin du Festival. Toutes les effigies sont menées au fleuve pour être immergées. On dit adieu à Durga jusqu'à l'année prochaine . @Fabrice Dimier

 

La Pandal gagnant du grand trophée. “Utopie“ soit l'harmonie des mondes et des cultures.@Fabrice Dimier

En haut :Trophée la fête de Durga; en bas de gauche à droite :Les artisans travaillent jour et nuit pour Durga Mela et Pandal au thème transgenre @ toutes les photos sont de Fabrice Dimier
Plus d’infos
 






Participer à Durga Mela

 


Il est nécessaire de se  renseigner sur les dates exactes car la fête est célébrée du sixième au dixième jour de croissance de la lune durant le sixième mois du calendrier bengali.
 

Choisissez un guide pour découvrir les plus beaux pandals sans vous perdre dans cette ville immense. Nous recommandons vivement l’agence Meghdutam Travels de Jaydeep Mukerjee, un passionné qui œuvre depuis une dizaine d’années pour une reconnaissance internationale de cet événement unique.

Du quartier des potiers pour observer les artisans au travail jusqu’aux immersions finales, son équipe vous laissera de Durga Mela un souvenir impérissable !
 






 
Web :  
  www.meghdutamtravels.in - 
             
 www.meghdutam.ca  

E-mail :  meghdutam@gmail.com


 

La mécanique quantique autre façon de penser le monde de Durga @ Fabrice Dimier


27/11/2019
Catherine Gary




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