Reportage

Une île hérissée de cratères, magnifiée par un artiste visionnaire.

Bulles volcaniques, coulées de lave, rivières souterraines… ces terres telluriques ont inspiré la créativité de César Manrique depuis le sommet des volcans jusque dans les entrailles de la terre, métamorphosant le destin de
son île natale classée Réserve naturelle de la biosphère par L’Unesco.

Par Catherine Gary



Lanzarote : El Golfo la lagune verte (Copyright O.T.www.turismolanzarote.com/)
Couverte d’une lave d’un noir intense, teintée de brun, de rouge ou d’orangé, semée aussi du vert changeant des cactus, vignes et palmiers, protégée du vent par ses murets de pierres sèches, l’austère Lanzarote est plus que singulière. 

De gauche à droite : Cultures protégées par des murets et du picon ; Effets de l'érosion Route des volcans (Copyright C.Gary)
Lanzarote, beauté sauvage façonnée par les volcans
 
Sculptée par des siècles de volcanisme  elle reste marquée par les éruptions successives dont une, mémorable, qui dura six ans de 1730 à 1736, la plongeant dans un brouillard sans fin de cendres.

Ici et là, 300 volcans ont formé des figurations abstraites et des vestiges de lave en fusion en guise de sculptures ou d’architecture pour géants, paysages de premier matin du monde. L’île étant aride, pas facile de s’en sortir seule en mer quand on manque d’eau douce. Alors on fait avec les moyens du bord. On plante le long des pentes volcaniques ce qui veut bien pousser dans les fissures de la roche et sous la protection des murets de pierres, dentelles minérales rehaussées de peinture blanche. Mieux encore, on écarte la terre arable du vent et de l’évaporation en la couvrant de picon, cette roche péniblement extraite du sous-sol puis réduite en poussière… 

Los hervideros Falaises de la côte ouest (copyright O.T.www.turismolanzarote.com/)

De gauche à droite : Timanfaya Restaurante del Diablo ; Montañas del Fuego (copyright O.T.www.turismolanzarote.com/)
Des paysages lunaires aux couleurs rougeoyantes

Si quelques plages de la côte Ouest - playa Blanca, puerto del Carmen, Costa Teguise - attirent les touristes venus de partout, les routes de l’intérieur réservent les plus belles surprises.

A commencer par le Parc national de Timanfaya qu’on appelle ici route des Volcans. Un univers résultant de ces fameux six ans de volcanisme ininterrompu. Vagues de lave pétrifiée, plissements extravagants, cônes et cheminées dressées sur un ciel sans nuages ni oiseaux, le tout se déclinant du pourpre à l’ocre clair, au jaune rehaussé du noir de la lave… Ici pas âme qui vive à part quelques lapins et musaraignes qu’on vient chasser au furet ou au chien lévrier. Les lieux sont arides, brûlés par le soleil. On les découvre en bus sur une boucle de 14 km qui ne marque pas d’arrêts pour mieux protéger ce site exceptionnel. Avant la balade on s’arrête néanmoins au Centre d’interprétation pour une introduction à la tellurique des plaques, à la production du magma et surtout à la géothermie en observant quelques expériences avec la chaleur venue des profondeurs. Et pour corser le tout, le restaurant panoramique del Diablo offre un premier contact avec le génial César Manrique qui l’a bâti au sommet de ce cratère. Dans ce restaurant unique les viandes sont grillées sous les yeux des consommateurs grâce aux émanations souterraines. Diabolique ! 

La petite ville de Teguise composée d'habitats traditionnels, monuments religieux et petits musées . (Copyright OTCM)

De gauche à droite : La petite bourgade de Haria C’est là que César Manrique passa ses dernières années. (Copyright C. Gary et O.T.C.M.)
Sur la lave couleur charbon des villages tout blancs
 
Là encore César Manrique a fait fort. Peintre reconnu à l’international, il est installé à New York quand il décide en 1966 de rentrer à Lanzarote.

Son île lui manque, il se lance alors dans un inventaire de ses richesses naturelles. Avec le soutien et le pouvoir décisionnaire d’un ami d’enfance local son projet gigantesque voire utopique commence à prendre corps : faire de cette île au caractère fort l’un des plus beaux endroits du monde.

Pour cela, préserver l’architecture locale ainsi que les paysages contre un tourisme de masse alors en plein essor. Il s’installe, construit sa maison sur un champ de lave et fait en sorte que le blanc s’impose dans le moindre village et que ces maisons cubiques ne dépassent plus les trois étages. Haro sur les enseignes et les panneaux publicitaires polluant le paysage et retour aux matériaux traditionnels.

La petite ville de Teguise est le plus bel exemple de cette réussite : habitat traditionnel, monuments religieux et petits musées animés chaque dimanche par le marché haut en couleurs. En février par le carnaval traditionnel des Diabletes et en novembre par une foire très courue de la gastronomie locale.
Plus au nord, la route sinuant à pic sur les pentes volcaniques mène à travers cultures d’oignons en terrasses, murets galonnés de blanc et villages immaculés, à la “Vallée des 1000 palmiers“, oasis inattendue sur ces terres arides. On se pose à Haria, une adorable bourgade immaculée à l’ombre de ses bougainvillées, le temps d’une petite balade dans ses ruelles solitaires au patrimoine préservé. C’est là que César Manrique passa ses dernières années. 

Fondation de César Manrique à Tahiche. (Copyright C.Gary)

Jameos del Agua, premier grand chantier de César Manrique est le manifeste éclatant de son génie au cœur de 300 mètres aménagés sur les 7 km de tunnels et de puits d’effondrement montrant le ciel, le tout reliant le volcan La Corona à la mer.(Copyright CM)
César Manrique, maître d’œuvre dans les entrailles de la terre
 
Pour découvrir l’homme, sa philosophie et son projet, commencer par sa demeure devenue Fondation César Manrique à Tahiche.

Construite sur une immense coulée de lave comme un défi à la roche volcanique, elle se déploie en surface et sous-sol en une succession de “bulles volcaniques“ reliées par d’étroits tunnels. Le contraste est saisissant entre le noir intense de la lave et la couleur immaculée de cet ensemble ponctué de terrasses, de bassins, de cactus venus de toutes les régions arides du globe. Ajoutez à cela les couleurs vives des peintures et sculptures de l’artiste et sa collection d’art contemporain et vous voilà initiés à la créativité de César Manrique. Jameos del Agua, son premier grand chantier est le manifeste éclatant de son génie au cœur de 300 mètres aménagés sur les 7 km de tunnels et de puits d’effondrement montrant le ciel, le tout reliant le volcan La Corona à la mer. On y accède par une volée d’escaliers en un voyage au centre de la terre façon Jules Verne avec vue plongeante sur le vaste lac souterrain qui, par réflexion de la voûte, semble un gouffre vertigineux. Après cette première bulle volcanique où un restaurant est installé, on longe le miroir d’eau jusqu’à une seconde bulle pour des soirées animées. Puis on remonte en surface vers la piscine où blanc et noir jouent avec le vert des palmiers. 

Mirador del Río (Copyright CM)

De gauche à droite : Intérieur du Mirador Del Rio; A Guatiza, c’est dans une ancienne carrière de pierre que Manrique à dessiné les méandres de son Jardin de Cactus en misant sur l’extraordinaire variété de ces plantes (Copyright C.Gary et CM)
Le Mirador del Rio et le Jardin des Cactus pour une nature à ciel ouvert 

A la pointe nord, Mirador del Rio est perché à 500 mètres sur une falaise qui surplombe la mer, délivrant un panorama époustouflant sur La Graciosa, une petite île où le temps semble s’être arrêté et à laquelle on accède en bateau.

L’architecture de roche et de verre du mirador contraste avec les formes organiques et douces, comme façonnées à la main, des escaliers en spirales et des petits bassins. A Guatiza, c’est dans une ancienne carrière de pierre que Manrique à dessiné les méandres de son Jardin de Cactus en misant sur l’extraordinaire variété de ces plantes, 1 400 présentes, dans une suite de sentiers, de terrasses et d’escaliers dominés par un ancien moulin. Les formes les plus excentriques s’y retrouvent pour une promenade dans cette verdure très piquante qui se plait dans la région par ailleurs dédiée à la culture des figuiers de Barbarie dont on extrait la cochenille, cet insecte qui délivre sa belle couleur pour teinture en rouge vif. 

La Geria Culture de vignes dans les creux de la lave.(Copyright OTC)

En haut de gauche à droite : Sculptures à la Fondation César Manrique; Sur la route des Volcans; en bas de gauche à droite : La salle de restaurant du Del Diablo; Et vue du haut du Mirador Del rio (Copyright C.Gary)
Plus d’infos

Turismo Lanzarote : 

www.turismolanzarote.com  

 Y aller :
Vol direct depuis Paris-Lanzarote les samedis matin avec Vueling. 
Vol quotidien avec escale à Barcelone avec Vueling
Vols directs avec Ryanair et Easyjet les samedi et mardi.  

Dormir :
Hôtel Seaside Jameos Playa 
Excellent hôtel à Puerto del Carmen, à quelques minutes à pied de la plage avec piscine, chambres donnant sur la mer. Restauration buffet de qualité et petit-déjeuner copieux.

www.los-jameos-playa.es
Hôtel Meliá Salinas 5*. Costa Teguise
Au cœur de jardins tropicaux et de piscines, vous êtes aussi de plein pied avec la très belle plage de sable fin. L’hôtel est classé Patrimoine artistique et culturel pour son design et son architecture. Plusieurs restaurants et bars présents dont un excellent italien et un autre de cuisine locale. 

www.melia.com



Visiter :
Festival du vin et de la gastronomie :

www.saborealanzarote.org
Musée agrícole de German Barreto,  El Patio 
Passionnante ferme ethnographique qui vous montre tout sur la vie traditionnelle et les ressources locales. On peut y déguster les produits fabriqués sur place avec un excellent accueil du propriétaire. 

www.museoelpatio.com
Fundación César Manrique
www.fcmanrique.org



   


18/01/2018
Catherine Gary




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