Entre la vallée de Munster et les villages de Riquewihr et Ribeauvillé, l’Alsace révèle sa belle diversité

Bienvenue dans la paisible vallée de Munster pour une immersion dans les coutumes locales.

La vallée a su garder ses traditions à l’écart des routes touristiques et c’est bien. Ce  Parc régional des Ballons des Vosges   est idéal pour se ressourcer loin des bruits de la ville, respirer un air non pollué, marcher le long des kilomètres de sentiers balisés par l’emblématique Club vosgien passé maître en idées de belles randonnées.

Cet été, la vallée sera d’autant plus appréciée que depuis des mois de prudent confinement on se sent des fourmis dans les pieds. De ses hautes chaumes et pelouses d’altitude les crêtes délivrent des vues lointaines sur les forêts de hêtres, de chênes et de sapins avec, au loin, les étendues du vignoble alsacien. Peut-être apercevra-t-on le lynx, le cerf ou le chamois qui vivent ici bien protégés tout en profitant de moments de sérénité dans cette nature préservée.

Producteurs laitiers et artisans perpétuent les savoirs d’autrefois

Ici l’emblème c’est le munster, un fromage à la pâte molle et au goût prononcé. Vous le goûtez de cent manières et même sous forme de macarons sucrés-salés d’une saveur fine et délicieuse.

Le mieux c’est de le déguster juste sorti de la cave du marcaire comme à la ferme du Versant du Soleil ouverte à la visite. Vous y apprenez les différentes phases de ce fromage de caractère depuis le filtrage du lait des Montbéliardes et des Simmental mis à reposer dans un chaudron en cuivre avant d’être chauffé à 32°, emprésuré, caillé et coupé en losanges. Mélangé à la pelle, le petit lait s’en dégage avant qu’on ne le verse dans des moules à trous où il va perdre encore son humidité et mûrir en cave. Entre temps il aura été maintes fois retourné, salé en surface puis sorti des moules. Vingt-sept jours plus tard le voilà prêt.
  
Au Musée de la Schlitte on vous raconte les métiers du bois d’autrefois. Pas facile alors d’acheminer les grumes et le bois de chauffage depuis les hautes forêts jusqu’au fond de la vallée. Seuls les schlitteurs avaient la force, l’adresse et le mépris du danger pour descendre sur des rails les lourds traineaux chargés jusqu’à 3 tonnes de bois tout en les maîtrisant du pied.

Montée des troupeaux au printemps vers l’herbe fraîche, redescente au village à l’automne…depuis des lustres la transhumance est l’occasion de joyeuses fêtes traditionnelles et de grands rassemblements.

Celle de printemps s’est faite sans suiveurs cette année pour les causes qu’on sait et les fermes vosgiennes n’ont pu proposer les événements festifs habituels.

Espérons qu’elle aura lieu cet automne quand les troupeaux redescendront. Les repas marcaires sous chapiteau, les démonstrations de fabrication de fromage, les concours du plus beau costume de vacher, les animations musicales avec cors des Alpes et défilés de vaches vosgiennes au son de leurs plus belles cloches accompagneront alors le retour des troupeaux dans les fermes de la vallée.

A la confluence de la Fecht la ville s’est peu à peu constituée autour d’un monastère bénédictin en 660.

Au XIVe siècle elle devient ville libre au sein de la Décapole alsacienne, mais les guerres successives et les combats ne la ménagent pas. Presque entièrement détruite en 1917, cette ville de culture catholique et protestante s’est reconstruite dans une solide pierre de grès rose qui accueille chaque année le retour des cigognes sur ses toits pour des nids pesant jusqu’à 500 kilos. On y compte un centre-ville très animé, un vaste jardin anglais conçu par les Hartmann, la famille d’industriels du textile locale qui a redynamisé la ville au siècle dernier.

Changement de décor entre contrefort des Vosges et plaine du Rhin, le long de ces coteaux où prospèrent les vignes depuis le Moyen Age, animées qu’elles sont de villages aux couleurs pimpantes et aux façades à pans de bois sculptés.

Profitez-en vite avant que les touristes ne reviennent en masse ! A Riquewihr, pas une maison qui ne soit dans l’harmonie d’ensemble. C’est l’image d’Epinal type du village alsacien, protégé depuis 1898 pour un patrimoine qui se classe troisième après Strasbourg et Colmar. Fief des comtes d’Eguisheim, de Horbourg puis de Wurtemberg, Riquewihr passe sous autorité de Louis XIV en 1680 avant de devenir française en 1796. Dans son vallon entouré de collines et de 300 ha de vignobles elle a prospéré derrière ses tours et une double enceinte protégeant ses riches vignerons. D’où ces belles demeures avec oriel érigées entre Renaissance et XVIII è siècle. On y découvre l’une des plus hautes maisons à colombages d’Alsace, 25 mètres et 5 étages, sans compter les enseignes craquantes dessinées par Hansi pour rappeler les métiers d’autrefois.

Trois châteaux sur les hauteurs donnent une idée de l’importance de cette ville de 5000 habitants au Moyen Age.


 Les Ribeaupierre furent grâce à leurs mines d’argent, leurs vignes, leurs puissantes alliances la plus grande seigneurie d’Alsace jusqu’à la Révolution ! Le dernier comte fut même grand-père de l’impératrice Sissi, c’est dire. La rue principale serpente sur 2 kilomètres entre ses maisons à colombages dont il faut déchiffrer l’agencement symbolique des pans de bois et celui des couleurs, le bleu cobalt pour les Catholiques, le rouge sang de bœuf pour les Protestants. Quatre quartiers composaient alors la ville à l’intérieur des tours et des remparts. Ceux des artisans, des commerçants, des nobles et des paysans. Le tout parfaitement ordonné au cœur d’un patrimoine viticole d’exception qui compte aujourd’hui trois Grands Crus, le Geisberg, le Kirchberg et l’Osterberg.

N’oublions pas la grande fête des Ménétriers, ces joueurs de fifre d’autrefois, la plus ancienne d’Alsace.

Elle date de 1390 et chaque premier dimanche de septembre (sauf cette année) elle rassemble plus de 1300 participants en costumes médiévaux défilent sur une vingtaine de chars.

On doit au vigneron Thibault Specht et au tonnelier Lionel Berger cette bonne idée de faire découvrir leur métier et leurs productions tout en se baladant dans les vignes et les petits villages voisins de Mittelwhir et Beblenheim à quelques minutes de Ribeauvillé.

Le premier vous mène à pied au cœur de ses 11 ha de vignes. « Les meilleures vignes sont situées traditionnellement à proximité des villages », explique-t-il. L’Alsace possédant la plus grande variété géologique de terroirs, il n’est pas toujours facile de faire son choix de domaine dans la vaste gamme des Sylvaner, Pinot Blanc, Riesling, Muscat, Pinot Gris, Gewurztraminer et Pinot noir. A Mittelwhir le Grand cru c’est le Mandelberg pour les Riesling et les Gewurztraminer. Thibault nous explique comment il travaille la vigne avant de nous mener chez le tonnelier qui va nous livrer les moindres étapes de fabrication de son beau métier. Choix du bois, coupe fendue et non sciée, taille en douelles, durée du séchage, assemblages, cerclage, finitions au feu et au rognage… Le tout se termine comme il se doit à la cave pour une joyeuse dégustation…