Avec amour pour son métier et autrui, Jean-Claude Aiguier demeure l’un des plus grands chefs lorrains. ©Bertrand Munier
Itinéraire d’un chef surdoué
Sans plagier outre mesure Prosper Montagné dont il est membre du club éponyme, Jean-Claude Aiguier ne cesse de louer « la cuisine du beau et du bon ».
La vie culinaire de Jean-Claude Aiguier est semée de belles rencontres à l’image de son confrère vosgien Henri Chevalier, installé à Bains-les-Bains. ©F et J.C Aiguier
Sa vie commence un certain 3 mai 1941 à Lunéville en Meurthe-et-Moselle quand il fait entendre sa voix pour la première fois dans la chambre familiale. « Maman Aiguier », comme il la surnomme, vient de mettre au monde le « petit » Jean-Claude, sans penser une once de seconde qu’il deviendrait un « grand » de la cuisine française.
Son existence, qui n’a pas toujours été tendre avec lui, il la voue entièrement à l’univers culinaire. Très tôt, il tombe dans le chaudron du restaurant parental « Le Relais des Vosges » à Monthureux-sur-Saône. Ce sont les prémices de ses premières armes avec un couteau et un fusil, non pas au titre de Nemrod, mais en tant qu’apprenti auprès des siens.
Véritable autodidacte (on dirait aujourd’hui self-made-man), il poursuit son apprentissage en Haute-Saône. « J’ai beaucoup appris chez Monsieur Jacques à l’Hôtel du Lion Vert, souligne-t-il. C’est même à Luxeuil-les-Bains que j’obtiens mon CAP en cuisine. Je me souviens très bien des crêpes flambées au kirsch de cette région. »
Son existence, qui n’a pas toujours été tendre avec lui, il la voue entièrement à l’univers culinaire. Très tôt, il tombe dans le chaudron du restaurant parental « Le Relais des Vosges » à Monthureux-sur-Saône. Ce sont les prémices de ses premières armes avec un couteau et un fusil, non pas au titre de Nemrod, mais en tant qu’apprenti auprès des siens.
Véritable autodidacte (on dirait aujourd’hui self-made-man), il poursuit son apprentissage en Haute-Saône. « J’ai beaucoup appris chez Monsieur Jacques à l’Hôtel du Lion Vert, souligne-t-il. C’est même à Luxeuil-les-Bains que j’obtiens mon CAP en cuisine. Je me souviens très bien des crêpes flambées au kirsch de cette région. »
Tout au long de son parcours, Jean-Claude Aiguier (à gauche) a su partager son savoir-faire avec nombre de ses pairs comme (de gauche à droite), Michel Philippe, Jean-Michel Turin et Claudy Obriot… tous aux côtés de l’artiste au « talent de bafouilleur », Pierre Repp. ©F et J.C Aiguier
Au sortir de ses premières années d’expériences professionnelles, Jean-Claude Aiguier est appelé sous les drapeaux pour une période de dix-huit mois.
Tout d’abord au 18e RT à Épinal puis toujours dans un régiment de transmission à Langres. Et pour allier son temps d’armée et désormais son métier de cuisinier, il rejoint les pianos de sa caserne haut-marnaise pour notamment jouer sa note culinaire au service du célèbre général Massu. Rendu à la vie civile, il revient dans le giron familial darnéen au restaurant « L’Éléphant » que son père à acheter en 1958.
« Une dénomination assez cocasse, commente-t-il, avec son éternel sourire qui lui creuse les joues. Un jour, un cirque est arrivé sur la place de Darney et une éléphante a mis bas un éléphanteau. D’où l’enseigne du pachyderme au fronton du restaurant familial. »
Là, avide d’acquérir d’autres facettes de son métier, il s’imprègne de recettes dans des livres culinaires tout en visitant les producteurs de sa contrée, sans négliger de faire halte dans quelques bonnes tables régionales.
À chaque instant, il regarde, il écoute et il note sur ses carnets. De retour chez lui, il reproduit tel ou tel plat ou soucieux d’approfondir son style créatif, il en élabore à sa façon. Parfois, il réussit dans son entreprise de réalisation. D’autres fois, il échoue. Qu’importe ! Il remet sans cesse l’ouvrage sur le métier pour atteindre l’excellence dans un art en accord avec ce qu’il est. Perfection ! Un terme qui lui sied tout au long de son brillant itinéraire culinaire.
Tout d’abord au 18e RT à Épinal puis toujours dans un régiment de transmission à Langres. Et pour allier son temps d’armée et désormais son métier de cuisinier, il rejoint les pianos de sa caserne haut-marnaise pour notamment jouer sa note culinaire au service du célèbre général Massu. Rendu à la vie civile, il revient dans le giron familial darnéen au restaurant « L’Éléphant » que son père à acheter en 1958.
« Une dénomination assez cocasse, commente-t-il, avec son éternel sourire qui lui creuse les joues. Un jour, un cirque est arrivé sur la place de Darney et une éléphante a mis bas un éléphanteau. D’où l’enseigne du pachyderme au fronton du restaurant familial. »
Là, avide d’acquérir d’autres facettes de son métier, il s’imprègne de recettes dans des livres culinaires tout en visitant les producteurs de sa contrée, sans négliger de faire halte dans quelques bonnes tables régionales.
À chaque instant, il regarde, il écoute et il note sur ses carnets. De retour chez lui, il reproduit tel ou tel plat ou soucieux d’approfondir son style créatif, il en élabore à sa façon. Parfois, il réussit dans son entreprise de réalisation. D’autres fois, il échoue. Qu’importe ! Il remet sans cesse l’ouvrage sur le métier pour atteindre l’excellence dans un art en accord avec ce qu’il est. Perfection ! Un terme qui lui sied tout au long de son brillant itinéraire culinaire.
De gauche à droite : Le couple Aiguier au sein de leur second restaurant « Les Abbesses » situé au n°23 rue de la Louvière à Épinal dans les Vosges. ©F et J.C Aiguier ; Pour la première fois de leur carrière, Francine et Jean-Claude Aiguier sont aux rênes de leur propre établissement, et ce, à l’enseigne aux « Abbesses » à Remiremont dans les Vosges. ©F et J.C Aiguier
L’étoile Francine qui l’a conduit à l’étoile culinaire
Sur ces entrefaites, l’amour lui tend les bras. Et ce, face à son restaurant, à l’institution Saint-Clément où la belle Francine vaque également en cuisine. Le coup de foudre se transforme en mariage.
Devenue Madame Aiguier puis maman, elle seconde efficacement son époux. Rapidement « L’Éléphant » devient une adresse incontournable des Vosges et même des départements limitrophes.
Chez lui, il a le privilège d’accueillir certaines têtes couronnées comme l’empereur Jean-Bedel Bossaka et surtout de nombreux artistes à l’image de Romy Schneider et Jean-Claude Brialy venus tourner à Vittel, leur film « Un Amour de Pluie ». Sans compter le comédien Bernard Blier, épicurien de la bonne chair, qui lui montre en live la cuisson de champignons. Aux côtés de Francine, sa cuisine prend une autre dimension. Si bien qu’à l’aube de l’année 1976, le célèbre Guide Rouge lui décerne un macaron. « C’est un uppercut en pleine face mais un magnifique coup droit, se souvient Jean-Claude Aiguier. Dans mes rêves les plus fous, jamais je n’aurais espéré obtenir une étoile et la voire briller dans une petite ville de la Vôge. » Toutefois, cette période solaire est de courte durée. Un antagonisme familial brise sa vie professionnelle darnéenne. Le couple Aiguier s’en va sous d’autres cieux. Leur chemin les conduit à Saint-Dié-des-Vosges mais surtout en Alsace, jusqu’au jour où une annonce notariale aiguise leur attention : « Restaurant à vendre à Remiremont dans les Vosges ».
Sur ces entrefaites, l’amour lui tend les bras. Et ce, face à son restaurant, à l’institution Saint-Clément où la belle Francine vaque également en cuisine. Le coup de foudre se transforme en mariage.
Devenue Madame Aiguier puis maman, elle seconde efficacement son époux. Rapidement « L’Éléphant » devient une adresse incontournable des Vosges et même des départements limitrophes.
Chez lui, il a le privilège d’accueillir certaines têtes couronnées comme l’empereur Jean-Bedel Bossaka et surtout de nombreux artistes à l’image de Romy Schneider et Jean-Claude Brialy venus tourner à Vittel, leur film « Un Amour de Pluie ». Sans compter le comédien Bernard Blier, épicurien de la bonne chair, qui lui montre en live la cuisson de champignons. Aux côtés de Francine, sa cuisine prend une autre dimension. Si bien qu’à l’aube de l’année 1976, le célèbre Guide Rouge lui décerne un macaron. « C’est un uppercut en pleine face mais un magnifique coup droit, se souvient Jean-Claude Aiguier. Dans mes rêves les plus fous, jamais je n’aurais espéré obtenir une étoile et la voire briller dans une petite ville de la Vôge. » Toutefois, cette période solaire est de courte durée. Un antagonisme familial brise sa vie professionnelle darnéenne. Le couple Aiguier s’en va sous d’autres cieux. Leur chemin les conduit à Saint-Dié-des-Vosges mais surtout en Alsace, jusqu’au jour où une annonce notariale aiguise leur attention : « Restaurant à vendre à Remiremont dans les Vosges ».
La pétillante cheffe vosgienne Lorraine Pierrat ne tarit pas d’éloges sur le chef Jean-Claude Aiguier. ©Bertrand Munier
En outre, elle est signée de maître Michel Marion, le gendre du chef Hubert Cleuvenot, le fondateur du restaurant étoilé « Les Ducs de Lorraine » à Épinal. Sans tergiverser, Francine et Jean-Claude signent à quatre mains et rebaptisent « La Mangeoire ».
Le 15 décembre 1978, l’établissement « Les Abbesses » ouvre ses portes et le chef Aiguier peut jouer enfin sa propre partition sans rien devoir à personne. En peu de temps, sa cuisine est couverte de louanges. Les distinctions s’accumulent. En 1981, il retrouve son étoile perdue à contre cœur dans les méandres de Darney. Un bel satisfecit personnel !
Le 15 décembre 1978, l’établissement « Les Abbesses » ouvre ses portes et le chef Aiguier peut jouer enfin sa propre partition sans rien devoir à personne. En peu de temps, sa cuisine est couverte de louanges. Les distinctions s’accumulent. En 1981, il retrouve son étoile perdue à contre cœur dans les méandres de Darney. Un bel satisfecit personnel !
Cinq ans plus tard (1987), la famille Aiguier quitte la cité des Chanoinesses pour une nouvelle odyssée au chef-lieu d’Épinal et toujours avec la même enseigne.
Une incompréhension pour certains Romarimontains mais une aubaine pour nombre de Spinaliens. Sans ambages, les guides culinaires adhèrent encore et toujours à son talent. Chef aux récompenses multiples, il sillonne également les continents pour prôner sa passion indéfectible pour la cuisine. Mais en 1995, c’est le clap de fin dans la Cité des Images.
Le rideau des « Abbesses » se ferme à jamais. Le couple s’installe à Saint-Etienne-lès-Remiremont sans pour autant mener une vie sédentaire. Un mot qu’ils bannissent de leur vocabulaire. Jean-Claude Aiguier intervient comme « conseiller en cuisine » auprès de plusieurs restaurateurs de la région et surtout de la société vosgienne de surgelés Thiriet à Éloyes.
Traiteur et chef à domicile
Puis, l’idée de faire la cuisine à domicile le titille. De quoi réjouir ses convives qui se régalent tout en restant chez eux.
Le succès est immédiat. Le temps d’un déjeuner ou d’un dîner (toujours avec son épouse), il s’occupe de tout. Une véritable aubaine pour ses clients d’avoir sous leur toit un ancien chef étoilé. Et que dire des plats proposés : assiette des trois foies gras, clafoutis de Saint-Jacques aux cèpes, giclettes d’escargots, raviole de joue de porc, tarte renversée de lapin aux champignons des bois…. Un véritable bonheur pour ce chef audacieux, empreint d’une rare disponibilité envers autrui comme envers ses confrères et amis, Michel Philippe, Claudy Obriot, Michel Million, Olivier Lapôtre, Cédric Bongeot, Stéphane Ringer… et la talentueuse Lorraine Pierrat (seule cheffe vosgienne) qui l’entoure de toute son affection depuis sa tendre enfance.
Le temps n’a pas d’emprise sur Jean-Claude Aiguier qui poursuit sa passion culinaire comme chef à domicile. ©Bertrand Munier
Mais, le 6 juin 2019 au matin, Francine, l’épouse aimante, la fidèle compagne de route de son odyssée culinaire et de son quotidien, s’en va à jamais trop rapidement.
Une disparition brutale qui laisse Jean-Claude Aiguier ainsi que ses deux enfants Véronique et Jean-Stéphane dans un désarroi profond, sans oublier ses amis. Dans leur maison stéphanoise, les photos souvenirs tapissent les murs de nombreuses pièces. Et sur toutes les images, ce même sourire radieux. Celui d’un bonheur sans borne qu’ils affichent depuis leur mariage. Indéniablement, dans le regard de Jean-Claude se mire celui de Francine.
Au sein d’un milieu professionnel où la critique est à la fois miel ou fiel, Jean-Claude Aiguier a toujours voulu porter sa cuisine au plus haut niveau même avec des produits simples du terroir. Quand nombre de ses collègues parlent de lui, les commentaires sont dithyrambiques : « le Stakhanov des fourneaux, le magicien de la cuisine, l’amoureux des saveurs… ». Somme toute, même avec une renommée à faire pâlir nombre de ses jeunes confrères, il continue à se faire plaisir, à faire plaisir, sans chercher les lauriers de la gloire, pour le bonheur de tous … et cela en toute modestie.
Une disparition brutale qui laisse Jean-Claude Aiguier ainsi que ses deux enfants Véronique et Jean-Stéphane dans un désarroi profond, sans oublier ses amis. Dans leur maison stéphanoise, les photos souvenirs tapissent les murs de nombreuses pièces. Et sur toutes les images, ce même sourire radieux. Celui d’un bonheur sans borne qu’ils affichent depuis leur mariage. Indéniablement, dans le regard de Jean-Claude se mire celui de Francine.
Au sein d’un milieu professionnel où la critique est à la fois miel ou fiel, Jean-Claude Aiguier a toujours voulu porter sa cuisine au plus haut niveau même avec des produits simples du terroir. Quand nombre de ses collègues parlent de lui, les commentaires sont dithyrambiques : « le Stakhanov des fourneaux, le magicien de la cuisine, l’amoureux des saveurs… ». Somme toute, même avec une renommée à faire pâlir nombre de ses jeunes confrères, il continue à se faire plaisir, à faire plaisir, sans chercher les lauriers de la gloire, pour le bonheur de tous … et cela en toute modestie.
Bertrand Munier
Jean-Claude Aiguier a élu domicile à Saint-Etienne-lès-Remiremont tout en cuisinant pour les autres… chez eux. ©Bertrand Munier
Plus d’Infos
« Jean-Claude Aiguier »
Chef à domicile
30 rue de Seux
88200 Saint-Etienne-lès-Remiremont
Tél : 06 71 82 62 12
« Jean-Claude Aiguier »
Chef à domicile
30 rue de Seux
88200 Saint-Etienne-lès-Remiremont
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